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Billet : La puissance de la considération

Dernière mise à jour : 8 oct. 2024

Chaque histoire relatée ne constitue pas une vérité ou une marche à suivre mais invite plutôt à l’inspiration.

J’aime bien ce mot, “Inspiration”, l’instant où l’on inspire les éléments dont nous avons besoin. Inspirer pour aller nourrir des parts de nous en carence d’un quelque chose qu’il serait pas toujours facile à nommer, peut être même inconscient, c’est subtil. Juste l’inspiration, comme guidée par l’intuition ou le besoin que “c’est cela dont j’ai besoin” là tout de suite.

L’intuition, le besoin en corps.

La lecture d’une quatrième page, changer d’air, un film choisi par la vue de son affiche, un plat goûté, une rencontre, un partage … etc des milliers de situations où nous nous inspirons les uns des autres sans même nous en rendre compte souvent. Ce qui n’est pas plus mal.

Avoir conscience que l’on s’inspire d’une personne ou d’une situation, c’est aussi la porte ouverte aux nœuds mentaux. Vous savez, ce moment où on se sent coupable de piocher un peu chez l’autre, où on se dit “mais en fait cela ne vient pas de moi”, “est ce que je suis en train de modéliser ? de copier ?”. Le syndrome de l’imposteur peut vite arriver !

L’inconscient à ses vertus.

C’est en cela qu’il n’y a pas de vérité ou une marche à suivre, juste une invitation à l’inspiration.

Si vous lisez ces quelques lignes ou écoutez, ce n’est peut être pas pour rien.

Je vous invite à laisser cheminer en vous les thèmes proposés et d’en faire votre propre théorie.


Définition de la considération: (dictionnaire)

Action de considérer quelque chose, de le faire entrer en ligne de compte.

Bonne opinion qu'on a de quelqu'un ; estime, égards accordés à quelqu'un.


Ma définition

En tant que thérapeute, je dirai que c’est, de fait, estimer la personne qui passe la porte de notre cabinet. La considération est un mouvement qui part de Soi pour aller vers une autre personne. Ce regard est imprégné de l’Amour existentiel. La considération offre un espace d’authenticité et d’expression quelque soit notre histoire et quelque soit la manière dont on la perçoit. La considération d’un être tel qu’il se présente c'est-à-dire avec ses capacités, ses incapacités, ses difficultés etc. est permissive. Dans la relation d’accompagnement la considération permet la liberté d’être. “Dans cet espace là, je peux être moi, je sais que je ne serai pas jugée ou abandonnée”. me partageait Léa.


La considération fait partie de la recette qui va permettre l’alliance au fur et à mesure des séances pour explorer sa liberté d’être ainsi tendre à faire des choix qui sont en accord avec ce que l’on souhaite pour Soi.

La considération inconditionnelle est l’un des socles les plus importants dans l’accompagnement.


Illustration...

Pour illustrer ce précieux mot, je souhaite vous partager l’accompagnement de Michèle.

Avec son accord. Son prénom a été changé.

Michèle, une femme de 70 ans pleine de fragilité et de lumière. Elle passe la porte de mon cabinet et s’assied sur ma banquette jaune toute douce pour déposer “ses bagages”.

“Michèle qu’est ce qui vous amène à rencontrer un thérapeute”

Sa posture change, elle se met en avant, au bord du canapé. Comme si toute son attention était de me faire passer un message bien précis “Vous savez ça fait 60 ans que j’ai des choses à dire et que je ne parle pas et quand j’essaye j’ai l’impression que ce n’est pas pris en compte, pas entendu. Comme ci mon histoire n’était pas importante …” - “Je crois vraiment que votre histoire est importante et qu’elle mérite d’être prise en compte Michèle”...


Elle exprime son besoin de parler, d’être écoutée et je pressens au-delà de ses mots, son besoin d'être considérée.

Fille d'immigrés italiens, toute petite elle part vivre avec ses grands parents car ses parents

s’installent en ville pour travailler dur en tant que commerçants. Elle les voit très peu mais vit sa vie de petite fille “c’est normal” ça se fait à cette époque là. Les gens pouvaient laisser leurs enfants pour aller travailler.” Elle se noue d’amour avec sa grand-mère qu’elle chérie tant. Quand elle parle de sa grand-mère, elle serre ses bras contre elle comme pour la ramener là ici et maintenant. Son visage est empreint de la douceur de leur amour partagé, de leur lien si précieux. Sa mamie est avec nous...

Quand les gens parlent d’amour, tout s’éclaire sur leur visage, comme si à cet instant précis, le corps laissait émerger tout naturellement ce sentiment précieux qui illumine et irradie. Les yeux brillent, les sourcils s’arrondissent, le corps s’ouvre…


Elle parle aussi de son papi, gentil, discret et généreux.

A l’ école elle subit du harcèlement, on se moque d’elle… A ce moment précis, elle exprime un traumatisme resté si longtemps dans son corps. Elle n’en a jamais parlé à personne.

Là aussi tout revient là ici et maintenant. Elle se sent désarmée. Sur son visage, à travers son corps, l'empreinte apparaît. Je rencontre cette petite fille vulnérable et fragile, cette petite fille annulée par le comportement de ses camarades. Des larmes coulent sur les joues de la petite Bernadette. Son corps se recroqueville, ses épaules tombent et son souffle est court.

“Je comprends vos larmes Bernadette, elles sont légitimes. Je comprends ce que vous traversez là tout de suite et je ressens la petite Bernadette qui enfin peut exprimer ce qu’elle ressent”.

Nous avons beaucoup échangé sur les émotions. Leur légitimité, leur sens, leur rôle, leurs messages, où est ce qu’elle les ressentait dans le corps.

Nous les avons découvertes et écoutées en pratiquant des séances de sophrologie.

Elle m’a aussi raconté le décès de sa grand-mère, caché pendant un an. Le désarroi dans lequel elle s’est trouvé. Le fait qu’elle ait dû s’occuper de son grand-père malade à la suite de la mort de celle qui était son socle. Sa tendresse pour ce “petit papi” et le sentiment que c’était impossible de lui parler de tout ce qu’elle traversait à l’école. La sensation qu’elle était son rayon de soleil quotidien et qu’elle ne pouvait pas parler pour le préserver de sa douleur.

Toute son histoire de vie a pris corps sous mes yeux. Je dirai même a pris nos corps sous mes yeux.

Ses mots racontaient, mais surtout son corps, par la gestuelle et la vibration de sa voix.

“Enfin Claire, je peux m'exprimer. Enfin je suis écoutée. J’en ai vu des gens, je ne me suis jamais sentie écoutée et CON-SI-DE-REE

Ce besoin nourri qui arrive, celui qui s’était dessiné en début d’accompagnement le voilà nommé de toute sa voix, de tout son corps et de toute son intention. L’intensité de cette phrase… Je m’en souviens encore. Dans mon corps à moi aussi cela prend vie. Je me relie à cette intensité, parce qu'elle répond au besoin existentiel d’être considérée, d’être vue, d’être entendue.

Ce qui m’a sauvée pendant mon parcours c’est d’avoir été considérée telle que je suis avec mon histoire de vie, mes difficultés, mes émotions et mes incapacités.

J’ai l’intime sentiment qu’à cet instant précis, Bernadette considère son histoire et ses ressentis, de comment tout cela la traverse tout autant que je considère moi son être. Il est important pour moi de préciser que la force de la relation d’aide et de la pratique de la sophrologie c’est de revenir à Soi et de se servir de la relation comme socle pour enfin oser vivre les difficultés que l’on traverse. Se sentir en sécurité pour vivre leurs intensités.

Bernadette, aujourd’hui, vit plus sereinement. Elle fait avec son histoire et avec ses difficultés. Se sent plus autonome pour canaliser ses émotions. Surtout elle s’offre douceur et bienveillance en ayant conscience que la reconstruction est un chemin de vie. Nous continuons l’accompagnement à son rythme.


« Le client doit percevoir, de façon au moins embryonnaire, la compréhension empathique et

la considération positive inconditionnelle que lui porte le thérapeute dans leur relation”

Carl Rogers 2001

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